… Dans un monde qui
semble ne réserver qu'une place sans cesse plus restreinte à tout ce qui ne
concourt pas immédiatement à la recherche du profit, les cultures doivent aussi
résister à la déferlante de produits standardisés. Nous devons défendre
résolument la diversité des cultures dans le monde, car l'uniformisation serait
un danger immense. Pour cela, la vitalité de notre création constitue l'un de
nos atouts les plus précieux.
Au moment de construire
l'Europe politique, la culture doit plus que jamais inspirer notre ambition
commune. C'est une responsabilité que les politiques partagent avec les
artistes et les intellectuels. Et c'est le sens même de l'appel "Pour
une Europe fondée sur la culture" lancé le 8 juin 2004, et dont je
souhaite qu'il puisse trouver le plus large écho.
L'ensemble des États
européens reconnaît l'importance de la culture dans la vie de la Cité. Elle
exprime les plus hautes aspirations de l'homme, sa soif de beauté, d'absolu, de
vérité, de perfection. Elle est porteuse d'un dynamisme et d'une créativité
nécessaires au progrès de nos sociétés. Elle constitue, pour les individus, un
facteur d'émancipation et d'épanouissement. Pour toutes les nations d'Europe,
elle n'est pas une activité secondaire, subsidiaire, elle est une valeur
fondamentale.
Nous reconnaissons aussi
que la culture ne peut pas être livrée au jeu du marché, pas plus
qu'elle ne doit être inféodée à l'État. La concentration menace la diversité
culturelle au même titre que la concurrence sauvage. Il est donc nécessaire
et légitime que la puissance publique - c'est-à-dire nos États, c'est-à-dire
aussi l'Europe - intervienne comme garante de la liberté d'expression et de
la diversité culturelle …
…La reconnaissance de la spécificité des biens culturels s'appuiera ainsi sur des
fondements juridiques solides et incontestables. L'Union européenne y
trouvera les bases d'une pleine reconnaissance des aides d'État en matière
culturelle. C'est déjà l'un des points forts de la directive "télévision
sans frontières", qui sécurise les systèmes nationaux de soutien à la
production audiovisuelle. Nous devons étendre ce type de démarche, et la
Constitution pour l'Europe va nous y aider puissamment. La France sera très
vigilante à cet égard.
Le Traité facilitera
aussi une pleine reconnaissance des industries culturelles. Celles-ci
jouent un rôle essentiel pour soutenir des pans entiers de la création et
diffuser la culture vers le public le plus large. Il faut consacrer leur
statut particulier. Elles méritent d'être encouragées et soutenues pour
constituer, autant que possible, des champions européens dans la compétition
mondiale. C'est notamment le sens des propositions françaises qui visent à une réflexion
commune sur la fiscalité des biens culturels…
….
Pour le cinéma et l'audiovisuel, cette situation a des racines
économiques : l'exportation des productions européennes est difficile car elles
doivent trouver leur rentabilité sur des marchés nationaux plus étroits que
ceux de nos très grands concurrents. Une intervention publique est donc
légitime pour tenir compte de cette donnée. C'est l'inspiration du programme
Média, qui est justement dédié à améliorer la circulation des films
européens, en Europe et dans le monde. Il mérite d'être prolongé et développé.
D'ores et déjà, l'Union
européenne facilite les liens entre artistes et institutions culturelles à
l'échelle du continent pour créer un vaste espace culturel européen. Je pense
par exemple au réseau THEOREM, qui réunit des festivals et des théâtres afin de
produire et de diffuser dans toute l'Europe des spectacles issus des nouveaux
pays membres, ou bien au réseau Varèse dans le domaine de la musique
contemporaine. Il faut multiplier et amplifier toutes ces initiatives.
Les ateliers qui ont
travaillé pour préparer vos rencontres ont fait de très intéressantes
propositions. Je retiens particulièrement entre autres la suggestion de créer
un label du patrimoine européen, qui viendrait combler un vide entre la liste
du patrimoine mondial de l'UNESCO et les mesures nationales de protection.
Désigner ainsi les monuments, les lieux de mémoire les plus remarquables de
notre patrimoine commun favorisera la prise de conscience de notre identité
culturelle.
De même, la proposition
d'un fonds européen de garantie pour faciliter la circulation des expositions
au sein de l'Union mérite d'être attentivement étudiée…
…De quoi s'agit-il concrètement ? De reconnaître que la culture n'est pas une marchandise, qu'elle ne peut donc être abandonnée au jeu aveugle du marché. C'est la conviction qui nous anime dans la construction de l'Europe, mais transposée à la mondialisation.
C'est tout le sens du combat
pour l'exception culturelle que la France et l'Europe, ensemble, ont mené
sans relâche depuis plus de dix ans, animées de la conviction forte que l'OMC,
et les discussions commerciales qui s'y déroulent, ne sont pas le bon cadre
pour traiter des échanges culturels. Portée par la mobilisation sans faille des
professionnels de la culture, notamment les cinéastes, la France n'a cessé,
avec d'autres, de se battre, pour défendre ce principe. C'est un combat rude et
qu'il faut livrer sans relâche, car les enjeux économiques sont considérables.
C'est aussi de notre vision de l'homme qu'il s'agit, car l'exception
culturelle est une affirmation politique et morale de la plus haute importance
: l'affirmation qu'il existe des activités humaines qui ne sauraient être réduites à
leur dimension marchande.
Grâce à
(Voir l’intégralité du Discours)
ACCORDS GATT
En
ce qui concerne le commerce des biens culturels, le maintien de
l’Article IV de